Ce qui se dit sur Sudbury, de beau et de pas beau, dans la littérature et les médias

dimanche 14 septembre 2008

Confiance et espoir (Lionel Groulx)

Depuis 1764, deux siècles tout près ont passé. Nos raisons de rester Français auraient-elles perdu de leur force ? Et si des motifs nouveaux nous commandent de renier la première attitude des ancêtres, quels sont-ils ? Je me rappelle de mon premier passage à Sudbury, en 1928. Je revenais de l’Ouest. Par besoin de prendre l’air, je descendis du train; j’arpentai le quai de la gare. Un modeste employé transportait des colis. Je l’abordai : Vous parlez Français ? – Oui Monsieur. – Est-ce qu’ici, autour de vous, tout le monde ne parle pas l’Anglais? – Oh! Oui, presque tout le monde. – Pourquoi alors parler français ? Le pauvre homme me regardait dans les yeux, un peu ahuri, sans doute, de s’entendre poser pareille question, Mais il se ressaisit et me jeta ces mots que je n’ai jamais oubliés : « Que voulez-vous? Vous êtes un passant, vous; et de me parler comme ça, dans ma langue, ça me travaille le cœur! » Qu’est-ce donc qui travaillait le cœur de cet homme du peuple ? Des motifs de confiance, de fierté qui, aux heures de doute, seraient propres en chacun de nous, à nous travailler le cœur, en sommes-nous si dépourvus?

Confiance et espoir, conférence prononcée par le chanoine Lionel Groulx le 13 novembre 1944 à Sudbury, dans Collection franco-ontarienne, no 1, Éditions de la Société historique du Nouvel-Ontario, Collège du Sacré-Cœur, 1945, 22 p.

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